07/11/2008

L’enfant dans la pratique

Dans la pratique de l’Aïkido, l’enfant part à la découverte – à travers les échanges de techniques et les différentes explorations de l’art martial – de lui-même et des autres.
D’abord son corps : les roulades, puis petit à petit les chutes, vont lui permettre d’explorer l’espace, de se situer mais, avant tout, de « rouler sur lui-même » : un peu comme un retour à soi pour se retrouver, se construire dans l’autonomie du déplacement et de l’exploration.
  

L’ECHANGE INTERACTIF DE L’AIKIDO :
Complémentarité et double sens 

 

L’Aïkido permet la découverte de son corps à travers les échanges de techniques dans une dimension proposant une variante dans l’exploration, un peu comme une lecture « en double sens » : l’enfant est tantôt uke, tantôt tori. Cela veut dire qu’il agit et qu’il se laisse agir. Il est acteur de l’action et il subit l’action de l’autre.
Tantôt active, tantôt passive : l’expérience permet d’intégrer la technique selon deux modes comportementaux bien distincts et deux échanges relationnels.
Sur le plan psycho-moteur, il s’agit de deux temps très différents et complémentaires. Sur le plan moteur et physique, le rôle seme (celui qui agit) suppose une action déterminée et un tonus musculaire suffisant dans la tenue du corps et des déplacements. Le rôle d’uke nécessite de se laisser agir (ce qui ne signifie pour autant devenir l’objet de l’autre…). C’est un temps de relâchement du corps, de laisser-faire, de non-force pendant lequel les tensions physiques et psychiques s’effacent. Sur le plan relationnel l’interchangeabilité suppose confiance et rapport à l’autre dans la bienveillance et le respect mutuel. Chez un enfant de 5/6 ans, l’on constate au bout de quelques mois de pratique l’émergence de certaines zones du corps qui semblaient se confondre – sur le plan énergétique et physique – à l’axe médian du corps. C’est comme si le buste commençait à sortir du bassin, comme si les bras se différenciaient petit à petit du buste, etc…
L’enfant peut alors utiliser l’ensemble de son corps pour exécuter les techniques et intégrer un geste entier impliquant toute la sphère corporelle.
 

LATERALISATION DE L’ENFANT :
une contrainte corporelle indispensable à la quête de l’identité et la perception de soi

L’ensemble des techniques d’Aïkido nécessite la mise en place de la latéralité.
Le travail de profil (hamni) est en quelque sorte la « contrainte corporelle » qui permet d’élaborer progressivement la perception spatio-temporelle autour de l’axe vertical.
A partir d’elle, les déplacements s’effectuent dans un espace déterminé et selon un archétype relationnel précis – pour que la technique soit juste sur le plan martial – et ceux-ci ne pourront se faire que lorsque l’enfant sera latéralisé. Cela suppose d’établir une unité psychomotrice, un lien entre verticalité et horizontalité et de poser un acte psychomoteur conscient et volontaire.

EVEIL DES SENS ET DE LA PERCEPTION

« Subir les techniques d’Aïkido – structurées selon les principes du mouvement universel – contribue à reconstruire, à préciser, à développer les voies de circulation de l’énergie et de la sensibilité dans l’être ».
Chez l’enfant, l’éveil des sens et de la perception en général passe par cette expérience psychomotrice où le corps est le lieu tout entier de l’être : son vécu, son histoire, sa mémoire collective et individuelle. En cela, il est le véhicule de l’individu unique et singulier que chacun a besoin de ressentir pour être, exister, communiquer, vivre tout simplement.

LIENS ET FRONTIERES
Une vision systémique du lien en Aïkido

Le lien c’est ce qui unit, réunit, relit mais aussi sépare. Sans lien, on est abandonné. Selon la qualité et la nature du lien, on peut être – à des degrés différents – relié, uni, réuni, ensemble mais aussi étouffé. Le lien trop présent devient étouffant ; de même le lien trop absent devient la seule présence , la seule manifestation du lien sans lien…
Pourtant les liens sains sont multiples et permettent la reconnaissance des affects, des niveaux de relations et d’échanges, d’émois et « des moi… » aussi divers que les sentiments et attachements, promesses et bonheurs partagés…
Les frontières préservent le lien. Elles tissent des espaces, des lieux, des zones de partages et de différenciation.

En Aïkido, le lien s’établit par le contact. Il est souple, ouvert, sans force et le pratiquant essaie de créer un lien (ki nomo subi) de centre à centre. Les frontières, elles aussi, existent, à l’intérieur même des rôles uke-seme mais aussi dans la technique elle-même.
Enfin, la perception du corps de l’autre, dans les échanges à tour de rôle, permet une appréhension de plus en plus fine des frontières interpersonnelles. Elles varient bien sûr dans chaque situation et selon les individus pratiquant.
Dans l’échange incessant des techniques, il y a bien sûr, le risque de la confusion, de l’inversion des rôles, de l’intrusion en soi de l’autre et de son action. La pratique aide à construire le geste dit centré (à partir du centre, du hara) par ce lieu inaliénable, inaccessible, indestructible …la forteresse non pas vide mais pleine d’énergie et de conscience du pratiquant d’Aïkido…  
Bonne pratique à nos jeunes et…moins jeunes…

 

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