Très souvent, les articles et interviews font état des maîtres masculins qui sont d’un pourcentage plus nombreux au sein de notre art que les féminines. Et pourtant, elles ont autant, si pas plus, de mérite que les « hommes » lorsqu’il s’agit de fouler un dojo et d’affronter les aléas de la pratique martiale. Bien sûr, nous côtoyons, lors des cours, pas mal de dames avides d’apprendre et qui s’en sortent bien souvent beaucoup mieux que nous…j’en connais même qui dégainent les tantos à la vitesse de l’éclair ;o), sans parler des enseignantes de très haut niveau comme par exemple Corinne Masson, Marie-Christine Verne ou Micheline Tissier mais qu’en est-il des personnages de légende essentiellement féminins à l’instar de Musashi ??
En plusieurs épisodes, voici donc quelques personnages très « yin » et qui feront certainement pâlir notre « yang »…
A commencer par Tomoe Gozen…
Tomoe Gozen 巴 御前 (littéralement Dame Tomoe, 1161?-1184 ou 1247?) est l’une des rares femmes samouraï de toute l’histoire du Japon. Tout comme le légendaire Miyamoto Musashi, sa vie a été à tel point utilisée et distordue dans les légendes populaires qu’il est aujourd’hui impossible de distinguer la vérité de la légende.
Tomoe combattit auprès de son époux (ou amant, selon les sources) Minamoto no Yoshinaka au cours de la guerre de Gempei, et ses exploits sont relatés dans le grand roman guerrier concernant cette guerre, le Heike Monogatari qui dit ceci :.
« …Tomoe était très belle, avec sa peau blanche et ses longs cheveux. Elle était un archer remarquable, et comme femme d’arme elle valait un millier de guerriers, prête à affronter un démon ou un dieu à pied ou à cheval. Elle était une cavalière hors pair. Lorsqu’un combat était imminent, son compagnon l’envoyait comme premier capitaine, équipée d’une impressionnante armure, d’un arc et une épée disproportionnée. Elle accompli plus d’actions de valeur que n’importe quel de ses autres guerriers. »
Si beaucoup de femmes de l’époque savaient manier la naginata, Tomoe était réputée être un samouraï de haut niveau, douée pour l’équitation, le tir à l’arc et le kenjutsu. On dit d’elle qu’elle était sans peur et très douée dans la bataille. Très respectée par les hommes, elle était l’un des principaux capitaines de Yoshinaka durant la guerre, et mena ses troupes au combat.
Après avoir repoussé les Taira dans les provinces de l’ouest, Yoshinaka prit Kyoto et commença à intriguer pour prendre le contrôle du clan Minamoto, allant même jusqu’à kidnapper l’ex-empereur Go Shirakawa. Le chef du clan, son cousin Minamoto no Yoritomo, envoya alors ses troupes contre le rebelle, sous le commandement de ses frères Yoshitsune et Minamoto no Noriyori. La confrontation finale eut lieu le 21 février à la bataille d’Awazu. Les troupes de Yoshinaka combattirent bravement, mais furent largement dépassées par le nombre. Quand Yoshinaka vit sa fin arriver, n’ayant plus que quelques soldats debout, il dit à Tomoe Gozen de fuir au lieu de se faire tuer par Yoritomo.
Ce qui advint ensuite de Tomoe n’est pas clair. Une version dit qu’elle resta et mourut à ses côtés. D’autres qu’elle a été vue fuyant le champ de bataille en emportant une tête (peut-être celle de Yoshinaka, à moins que ce fut celle d’un ennemi). La suite est encore moins certaine : certaines versions prétendent qu’elle se jeta dans l’océan avec la tête, alors d’autres la font survivre et devenir religieuse bouddhiste voire qu’elle se serait remariée.
De par le caractère si inhabituel de sa vie, elle est devenue une légende qui elle même s’est diversifiée en de nombreuses versions contradictoires, ce qui augmente encore son intérêt aux yeux des Japonais, certaines légendes allant même jusqu’à dire qu’elle était la réincarnation d’une déesse des rivières. Elle fait l’objet de nombreuses créations du théâtre No.