L’harmonie, wa ou ai, est cette relation idéale entre les êtres humains que cherche à établir le pratiquant de la voie du thé. La pièce de thé est un endroit privilégié où rechercher cette harmonie, mais le but profond est de pouvoir retrouver cette harmonie dans toutes les situations de la vie.
Le pratiquant occidental d’aikido traduit généralement le caractère ai par harmonie. En fait, ce ai est plus précisément la rencontre harmonieuse, la capacité à harmoniser son comportement à celui du partenaire. Le ai de l’aikido participe donc du wa du chado. On remarquera que l’aikido aussi bien que le thé n’ont de sens que parce qu’une rencontre s’y établit : la pratique solitaire n’aurait aucun sens.
Saotome sensei explique : "il n’y a pas de kata individuel en aikido, car l’aikido est harmonie des relations. Sur le tatami d’aikido, vous rencontrerez des gens de différentes origines sociales, de différent statut, de différentes cultures et langages, de différentes opinions politiques ou philosophies religieuses. Ils viennent ensemble non pour entrer en compétition, non pour imposer leurs propres idées aux autres, mais pour apprendre à s’écouter les uns les autres, à communiquer à travers l’Aikido.
Sur le tatami, nous ne pouvons pas cacher notre vrai soi. Nous montrons nos faiblesses comme nos forces. Nous transpirons ensemble, affrontons le stress ensemble, nous nous aidons les uns les autres, et nous apprenons à faire confiance […] Nous sommes tous des individus, mais nous sommes tous une partie de chacun des autres. […] Ceci est l’harmonie."
Si la recherche d’une relation harmonieuse est déjà riche en soi, elle n’est qu’une étape dans la recherche d’une harmonie plus universelle. Au fur et à mesure de ses progrès, le pratiquant du thé devient plus sensible aux rythmes naturels qui l’entourent : rythme du feu qui chauffe l’eau, rythme des gestes du temae, rythme des jours et des saisons, rythme de la respiration des partenaires…
Cette sensibilité aux rythmes permet au pratiquant d’être sensible à tout ce qui l’entoure, de s’adapter naturellement aux circonstances. Le pratiquant d’aikido reste attentif à son entourage pendant le déroulement de la technique, c’est typiquement le sens de shihonage. L’amateur de thé s’adapte de même à l’imprévu : il prévoit la pluie.
OSensei exprimait que le pratiquant d’aikido ne fait qu’un avec l’univers. Saotome sensei a illustré comment le pratiquant intègre à ses gestes les rythmes de la natures : ainsi, koshi nage est le rythme de la vague se brisant sur un rocher, ikkyo omote le reflux de la vague sur la plage… Dès la rencontre initiale, une connexion s’établit entre deux partenaires d’aikido, et se maintient tant qu’ils travaillent ensemble, technique après technique. De même, une connexion se crée entre l’hôte et ses invités, entre les invités eux-même, dès l’accueil au machiai. La communication s’établit de coeur à coeur, et se passe de mots.
Au fur et à mesure que le pratiquant ressent cette harmonie avec la nature, il perçoit intimement l’évanescence de toute chose, la permanence du changement, et apprécie chaque instant en lui-même. De même pour le pratiquant d’aikido : chaque technique est unique, nait de la rencontre de uke et de tori et ne vit que dans l’instant. Petit à petit, cette sensibilité s’étend à tous les domaines de la vie. Pratiqués du fond du coeur, le thé comme l’aikido amènent à ressentir profondément cette harmonie créatrice de paix…