Un texte de Marc Senzier http://shindoaikiryu.blogspot.fr/
Merci à lui
.. ou logique d’un abandon progressif
Après l’enthousiasme des premiers cours, l’effet euphorique des premiers pas s’efface. La découverte des premières techniques annonce déjà une route longue, voire difficile. Il ne faut pas se cacher la face : la formation d’un Budoka passe par l’apprentissage et l'expérimentation durant de nombreuses années, et ceux qui ont cru aux exploits de « Miyagi Sensei », dans « Karaté Kid », propulsant un jeune néophyte au rang de champion en une saison, se mettent deux doigts dans l’œil. La route, si vous la suivez, vous mènera plus loin, plus tard. Elle est aussi semée d’embûches dont certains ne se relèveront pas. Il faudra être patient et persévérant. Vous vous découragez ?! Non, au contraire. Relativisons…
Les anciennes écoles (Dojo) accueillaient des élèves internes qui pratiquaient de manières intensives. En l’espace d’un peu plus d'un mois et ils arrivaient facilement à un quota d’heures que certains ne totaliseront à peine en une saison (2 x 1h30 x 33 semaines = 100 heures environ).
Si l’on se réfère à la progression KYU (grades ou niveaux avant les ceintures noires), le temps minimum pour accéder au shodan (1ère DAN) est d’environ 4 saisons, bien qu’il ne soit demandé pour cet examen que 10 heures de stages Dan (ca dépend des fédérations…). Il y est précisé que ces temps sont des minima réglementaires et qu’il faudra en moyenne les multiplier par 2.
Combien d'années de pratique dans cette magnifique attitude?
Les acquis se font progressivement, au rythme de chacun, selon d’âge, la motivation et la condition physique du pratiquant (phase 1).
La progression atteint un premier palier où l’on pourra constater une « certaine régression ». C’est une étape naturelle dans le processus de l’apprentissage. Elle correspond à une phase de « digestion » et on peut la comparer à l’adolescent qui subitement grandit d’une bonne quinzaine de centimètres et doit prendre de nouveaux repères dans un corps en pleine mutation. (Serait-ce là le support physique de la crise d’adolescence ?).
De plus, votre professeur, suivant son humeur du jour bonne ou mauvaise, vous poussera parfois au maximum dans le but de vous faire progresser et…vous n’aimez pas cela !!! Pourtant, celui-ci a du subir bien souvent la mauvaise humeur de ses Maîtres et ce même parmi les plus grands, il faut aussi relativiser cela et le prendre comme une autre manière d’enseigner, sortir de la routine douillette… « vous booster » un tantinet.
Bon ! Vous voilà en pleine crise, vous perdez vos repères, vous avez du mal à exécuter certaines techniques qui vous semblaient acquises (et c’était un leurre, d’ailleurs). En bref vous déprimez. En perdant le plaisir de la pratique et en voyant les « nouveaux » en pleine réussite de la phase 1, votre motivation s’envole et vous vous trouvez des tas de très bonnes et valables excuses vous convainquant que vous êtes contraint de sécher les cours ou que vous avez bien mieux à faire.
C’est lors de cette étape (phase 2) que beaucoup quittent les dojos, et souvent de manière définitive.
Vous avez franchi le cap et vous voilà remontant la pente qui, après coup, n’était pas si terrible (phase 3). Vous progressez et vous êtes engagé sur la voie Aïki. Le port de l’Hakama y symbolise votre engagement. Il faudra être assidu pour s’avancer vers le Shodan. Attention, il ne faut pas prendre celà comme une finalité car…ce n'est que le vrai début (Yudansha, le débutant) et puis c'est surtout votre évolution personnelle qui incombe. Certains se glorifient de grades "Dan" mais…"Bonne renommée vaut mieux que ceinture dorée…".
Voir toujours un peu plus loin
Si vous vous fixez des objectifs comme « arriver au niveau Shodan » ou encore « porter l’Hakama » sans voir un peu plus loin, vous aurez de grande chance d’arrêter d’être assidu une fois votre objectif atteint. Si vous vous fixez un objectif trop éloigné ou irréalisable vous aurez de grande chance de vous démotiver totalement. Si vous êtes trop pressé, votre impatience vous jouera des tours. Profitez du voyage, appréciez le temps présent, laissez-vous porter vers la prochaine étape. Le phénomène de régression peut se répéter comme de multiples vagues d’intensité de plus en plus faible. Mais leurs écumes laisseront s’échouer çà et là encore quelques démotivés.
Pour ceux qui reprennent après un arrêt conséquent, rien n’est simple. Avant tout parce que le niveau, dit niveau de rétention est plus faible. Le corps en l’absence d’exercices physiques réguliers s’est affaibli aussi. Il faut accepter d’être moins qu’avant, d’avoir été dépassé par certains que l’on a vu naître, crever l’illusion que l’on est encore alors que l’on n’est plus. En bref, plein de claques en perspective c’est dur, dur pour l’Ego.
Les phénomènes décrits sont vrais, et je vous prie de m’excuser de toutes les ressemblances avec des personnes ayant vécues ces expériences.
Pour elles, comme pour tous, une seule issue : Pratiquer de manière régulière.
· Etre régulier : c’est venir toutes les semaines.
· Etre assidu : c’est laisser de côté les problèmes de tous les jours pendant la pratique.Bien sur on peut rater un cours, avoir un empêchement. Seuls les empêchements réguliers porteront atteinte à votre régularité.
Pratiquer à son rythme
Respecter sa condition physique est un premier élément si l’on veut pratiquer longtemps, mais faire en sorte que l’on accède à un rythme supérieur, c’est s’améliorer progressivement.
C’est SHIN, GI, TAI : l’Esprit, la Technique , le Corps.
Lorsqu’on est jeune Taï est fort, GI se travaille et SHIN est souvent insouciant. Vers la quarantaine un équilibre subtil s’opère, c’est peut-être la force de l’âge. En vieillissant TAI s’affaiblit, mais GI est fort et avec SHIN transcendent TAI. L’équilibre SHIN GI TAI permet de s’améliorer à tout âge. Cependant si vous commencer tard, demander conseil à votre médecin, un test d’effort pour permettre de vous situer. N’essayer pas de vouloir rattraper le « temps perdu », soyez patient.
Expérimenter sa pratique
L’Aïkido peut être pratiqué de manière très différente selon la sensibilité du professeur. Parfois on rencontre, lors de stages, des personnes qui pratiquent un « autre Aïki » et on peut avoir du mal à s’exprimer ensemble. Pourtant ces stages sont l’occasion d’approcher de haut-gradés et de rencontrer des Aïkidokas en dehors du cocon douillet du club. Ces expériences sont enrichissantes. Votre professeur vous indiquera les stages les plus appropriés dans les premières étapes de votre progression. Un certain nombre de stages (organisés par la Fédération ) sont d’ailleurs nécessaires pour l’inscription à l’examen de grade Dan.
La proximité des clubs permet aux plus motivés de pratiquer de manière assidue et quasi-journalière. Cette possibilité est un atout permettant une 3ème voir une 4ème séance hebdomadaire. La voir comme un « joker », (se dire : je n’y vais pas ce soir, j’irai demain) est une grave erreur qui ébranle la régularité de votre "SHIN".
Pour ceux qui n’ont la possibilité que d’une seule séance hebdomadaire, la rigueur de la régularité est indispensable car dans le cas contraire vous tenterez de maintenir un niveau qui vous échappera malgré vous. En connaissance de causes, vous êtes seuls responsables de vos choix.
Ma volonté est d’entretenir votre enthousiasme, d’accroître votre motivation. Le plaisir de la pratique est à lui seul une source d’énergie intarissable que je souhaite partager avec tous et le plus longtemps possible.
Voie de l’enseignant
L’enseignant, contrairement à l’élève n’a pas trop le choix, il doit être là et ce même s’il a choisi délibérément cette voie ; maladie, problèmes familiaux, mauvaise humeur ne peuvent l’empêcher de dispenser son maigre savoir. C’est le suivi de la voie.